Dès la première lecture du livre « Le Recommencement », de Peter Handke, je sus qu’un jour je devrais coûte que coûte en venir aux mots. Des mots pour ressentir et comprendre la charge émotionnelle qui m’avait investie. Des mots désireux de nommer le frémissement de l’âme et l’origine de ce frémissement.Me permettant de reprendre les termes de Jaccottet, je dirais que j’ai été intimement et violement saisie par la poigne vigoureuse d’un Handke – au point de ne plus pouvoir résister.
Pendant trois ans, j’ai vécu avec les personnages imaginés par l’auteur. Pendant trois ans, j’ai tourné autour de la Montagne de la Sainte Victoire. Avec Sorger, j’ai parcouru l’Alaska et le Grand Nord. En me battant, j’ai suivi Andreas Loser dans la forêt, près de Salzbourg où logeait la détermination terrible du Chinois de la Douleur. Avec Filip Kobal, j’ai découvert le Lago di Doberdobo ou Doberdobsko jezero en slovène, les dolines rouges de l’absence et le blanc total des falaises de Tomaj.
« Une autre lecture de Peter Handke », c’est donc, par le biais de poèmes, la manière la plus adéquate que j’aie trouvée d’exprimer la diversité des émotions ressenties à la lecture de cet auteur. Mon propos n’était pas de rapporter la pensée d’un écrivain, mais de me laisser inspirer. Les poèmes qui sont nés portent à la fois le sceau de leur origine et leur propre originalité. Ils peuvent donc se lire sans référence à la source première. Je pense cependant qu’une autre lumière complémentaire les traversera si le lecteur s’accroît d’un regard qui comprend aussi la connaissance des œuvres citées.